Originaire de Fleurance et naturalisé Canadien, l’homme d’affaires de 72 ans se raconte dans un ouvrage publié en 2023, qu’il souhaite désormais adapter sur grand écran avec l’aide de l’IA.
Un simple article ne suffit pas à conter l’histoire rocambolesque de cetenfant du Gers, parti à 19 ans à la conquête du monde. Il faudrait un livreentier. Cela tombe bien, Jean-Claude Sensemat en a publié un l’an dernier. Son titre, Le pionnier, témoigne de l’ego assumé de ce « self-made-man »autodidacte, petit-fils d’agriculteur et fils de radioélectricien devenu homme d’affaires influent en France puis au Québec, où il réside depuis 17 ans. « J’ai fait ma place et je suis devenu un personnage connu dans Montréal », témoigne-t-ils ans rougir.
La photo affi chée sur la page d’accueil de son site officiel parle d’elle-même : on y voit Jean-Claude Sensemat poser devant sa Rolls Royce Phantom, avec le message suivant : « Depuis 1970, entreprend et développe ses affaires, encore et toujours ». À 72 ans, il n’est donc visiblement pas près de mettre un terme à sa riche carrière d’entrepreneur, au sens propre comme au figuré. Celle d’un «pionnier de la mondialisation » qui a son nom au « Who’s who ».
Tout a donc commencé dans le Gers, à Fleurance. Orphelin à 19 ans, Jean-Claude Sensemat voit sa vie basculer après le suicide de son père. « Il fallait queje me bouge, témoigne-t-il. J’ai décidé de vendre de l’outillage parce qu’il n’yavait plus de forgeron ici. Je me suis dit que les clients, des paysans, allaient avoir besoin d’outils pour réparer les tracteurs qu’ils venaient d’acheter. »
« J’ai perdu la partie outillage comme on perd un enfant »
C’est le début d’une aventure qui le mènera à la tête de l’une des plus grandes entreprises du département à la fin des années 90 (Sensemat outillage),employant près de 500 salariés au plus fort de son activité. Pour en arriver là, illui faudra conquérir de nouveaux marchés diffi ciles d’accès : la Chine, encore maoïste au début des années 70, l’Inde ou encore l’Albanie communiste. Desvoyages mémorables qu’il relate dans son ouvrage. Sa réussite et son bagout lemèneront dans les plus hautes sphères économiques, culturelles et politiques. «J’étais ami avec Pierre Cardin », rappelle Jean-Claude Sensemat, qui sera nommé en 2002 consul honoraire de la république d’Albanie à Toulouse.Comme tout entrepreneur, il connaîtra aussi l’échec, avec la fermeture de sonentreprise d’outillage en 2000. L’administrateur judiciaire chargé duredressement du groupe sera quant à lui condamné pour détournement fonds.
« J’ai perdu la partie outillage comme on perd un enfant »,
confie Jean-Claude Sensemat. Il assure toutefois ne jamais avoir profité de la situation. « On a même remboursé de l’argent, et tout ce que je dis, je peux le prouver »,soutient-il.
Cet épisode laissera malgré tout des traces, une plaie encore ouverte aujourd’hui. « J’ai aimé les Gersois plus qu’ils ne m’ont aimé. Le Gers, ce n’estpas un pays d’industrie ou de commerce », regrette-t-il. Il en faudra plus pourmettre l’homme d’aff aires hors circuit. Au début des années 2000, Jean-Claude Sensemat décide de refaire sa vie au Canada. « Je ne suis pas resté KO parterre. Je suis parti sur un autre continent pour redémarrer les choses. J’ai refaitdes affaires et j’ai agrandi mon patrimoine », souligne celui qui est aujourd’hui spécialisé dans la finance et l’immobilier.
Cette carrière hors du commun, Jean-Claude Sensemat la relate donc dans Lepionnier. Un livre qu’il envisage d’adapter au cinéma « d’ici trois ans », à l’aide de l’intelligence artificielle. « Je ne le fais pas pour l’argent, la renommée ou l’ego.Ce qui m’importe, c’est d’être heureux », assure-t-il. Son bonheur, Jean-Claude Sensemat le trouve en effet aujourd’hui auprès de son épouse, de son fils et de ses petits-enfants. De sa terre natale en revanche, il ne garde plus que quelques amis. « Les gens que je connais se manifestent sur les réseaux sociaux. Il y a deux ou trois personnes qui sont chères à mon coeur », conclut-il, sans rancune.Tel est sans doute le prix à payer pour un homme au destin si singulier.
Vincent Couet-Lannes
Responsable adjoint de l'édition du Gers
La Dépêche du Midi
Publié le 10/01/2024